L’annonce de Donald Trump, qui a proposé de prendre le contrôle de la bande de Gaza et de déplacer ses habitants, a suscité une avalanche de condamnations chez les Palestiniens et à l’étranger, au moment où les délicates négociations sur la poursuite de la trêve entre Israël et le Hamas devaient reprendre.

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Le mouvement islamiste palestinien a accusé le président des Etats-Unis de « jeter de l’huile sur le feu » avec ses déclarations, qui ne « contribueront pas à la stabilité » du Proche-Orient. Donald Trump a fait cette annonce mardi, après avoir reçu à la Maison Blanche le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, selon qui cette proposition pourrait « changer l’histoire ».

Le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, rival du Hamas, ainsi que l’Egypte, la Jordanie et plusieurs capitales occidentales ont dénoncé les déclarations de Donald Trump, que Paris a jugées « dangereuses pour la stabilité » de la région et « le processus de paix ». « Nous ne permettrons pas que soient bafoués les droits de notre peuple », a affirmé M. Abbas.

Le projet semble irréalisable, notamment en raison de l’attachement des Palestiniens à leur terre, de l’opposition des pays arabes et du droit international. Donald Trump a pourtant répété mardi que les habitants de l’enclave en ruines, après quinze mois de guerre, pourraient aller vivre en Jordanie ou en Egypte, en dépit de l’opposition des gouvernements de ces deux pays et des Gazaouis eux-mêmes.

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« Les Etats-Unis vont prendre le contrôle de la bande de Gaza », a dit Donald Trump en présence de M. Nétanyahou, en parlant du territoire palestinien comme d’un « chantier de démolition ». Le président américain a affirmé que les Etats-Unis allaient « aplanir la zone et se débarrasser des bâtiments détruits », afin de développer économiquement le territoire. Il a évoqué un projet « à long terme », en répétant son vœu de faire de Gaza la « Côte d’Azur du Moyen-Orient ».

« Vivre ou mourir ici »

Beaucoup d’habitants du territoire assiégé, rentrés chez eux à la faveur de la trêve, expriment le souhait de le reconstruire. « Nous luttons contre les déplacements depuis 1948 », l’année de la création d’Israël, a fait valoir Ahmed Al-Minawi, 24 ans, de retour dans la ville de Gaza. « Nous refusons d’être expulsés de notre terre. C’est notre terre. » « Je suis gazaoui, mon père et mon grand-père sont originaires d’ici. (…) Nous n’avons qu’une seule option : vivre ou mourir ici », a ajouté Ahmed Halasa, un habitant de la même ville âgé de 41 ans.

« Le plan de Trump a du sens », juge, en revanche, Kfir Dekel, un Israélien de 48 ans qui vit dans la zone frontalière de l’enclave. « Gaza est complètement détruite et il est impossible de réparer tant qu’il y a des gens. Laissons-les partir et construire leur vie ailleurs, et nous ferons vraiment de ce lieu un îlot de paix », ajoute-t-il.

Donald Trump avait déjà suscité l’indignation internationale en proposant de faire « tout simplement le ménage » et de transférer les Gazaouis dans des lieux « plus sûrs ». L’Egypte, frontalière de la bande de Gaza, a invité mercredi l’Autorité palestinienne à reprendre le contrôle du territoire, d’où elle a été chassée en 2007, quand le Hamas y a pris le pouvoir. Et le roi Abdallah II de Jordanie a réitéré son refus de « toute tentative » de déplacement ses Palestiniens, lors d’une rencontre avec Mahmoud Abbas.

Tout transfert forcé ou expulsion prohibé

Pour la France, l’avenir du territoire passe par « un futur Etat palestinien » et non par le contrôle « d’un pays tiers ». Selon le premier ministre britannique, Keir Starmer, les Palestiniens de Gaza doivent pouvoir revenir « chez eux et reconstruire ». Le territoire « appartient aux Palestiniens », a aussi estimé le gouvernement allemand. Le haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a en outre rappelé que tout transfert forcé ou expulsion d’un territoire occupé était « strictement prohibé ».

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Opposé à l’accord de trêve, le ministre des finances israélien, Bezalel Smotrich, issu de l’extrême droite suprémaciste, a promis mercredi de tout faire pour « enterrer définitivement » l’idée d’un Etat palestinien.

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La rencontre à la Maison Blanche a coïncidé avec l’annonce d’une reprise des négociations sur le cessez-le-feu à Gaza, dont une première phase de six semaines a débuté le 19 janvier, mais dont la suite reste incertaine. Le Hamas a annoncé mardi que la reprise de ces négociations avait « commencé ». Le gouvernement israélien a annoncé qu’il enverrait « à la fin de la semaine » une délégation au Qatar, pays médiateur avec les Etats-Unis et l’Egypte, pour discuter de la poursuite de la trêve.

La première phase de l’accord de cessez-le-feu a permis la libération de 18 otages qui étaient retenus dans la bande de Gaza et d’environ 600 Palestiniens détenus en Israël, un afflux de l’aide humanitaire et le retour de plus d’un demi-million de déplacés dans le nord du territoire. La deuxième phase doit permettre la libération des derniers otages et la fin définitive de la guerre, avant une dernière étape consacrée à la reconstruction de Gaza.

Au total, 251 personnes avaient été enlevées le 7 octobre 2023 lors de l’attaque du Hamas dans le sud d’Israël, qui a entraîné la mort de 1 210 personnes du côté israélien, en majorité des civils, selon un décompte de l’Agence France-Presse basé sur des données officielles israéliennes.

L’offensive israélienne menée en représailles a fait au moins 47 518 morts, en majorité des civils, selon le ministère de la santé de l’enclave, dont les estimations sont jugées fiables par les Nations unies.

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Le Monde avec AFP

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