La Chine et les Etats-Unis aimeraient bien divorcer. Mais les deux premières économies mondiales n’y arrivent pas. Trop de liens les attachent encore l’une à l’autre. Donald Trump entend libérer l’Amérique de sa dépendance aux produits chinois ; Xi Jinping veut que l’empire du Milieu soit une puissance la plus autonome possible. La bataille sur les droits de douane peut connaître un répit, elle n’en va pas moins se poursuivre : elle est l’une des facettes de l’affrontement sino-américain.
Annoncée le 12 mai, à Genève, la pause de trois mois dans la guerre commerciale entre les deux pays offre un répit. Washington abaisse de 115 points la folle barrière douanière imposée par Trump aux exportations chinoises aux Etats-Unis – on passe de 145 % à 30 %. Réponse du berger à la bergère, Pékin avait répliqué avec une protection de 125 % aux frontières chinoises, aujourd’hui ramenée à 10 %. Pour autant, la guerre n’est pas finie.
Trump, non sans raison, pointe la responsabilité de la Chine dans quelques-unes des faiblesses de l’économie américaine : désindustrialisation (et ravages sociaux), déficit commercial, addiction multiforme au « made in China » (et prix imbattables) y compris dans des domaines touchant à la sécurité du pays. L’acte d’accusation américain dénonce, côté chinois, des pratiques commerciales prédatrices, une concurrence faussée par les subventions et autres manipulations monétaires, par l’absence de normes sociales et environnementales.
La Chine a ainsi construit la première base industrielle au monde et fonde son développement en priorité sur l’extension sans limite de ses exportations. Le New York Times rappelait, le 12 mai, l’objectif fixé par Xi en avril 2020 aux dirigeants de l’économie chinoise : favoriser la dépendance à la Chine dans les chaînes de valeur internationales (qui assurent la production de nombre de produits).
Mélange coupable
S’il tacle à juste titre les déséquilibres commerciaux globaux hérités du libre-échange de ces quarante dernières années, Trump se trompe sur la responsabilité exclusive de la Chine. Cultivant la nostalgie du « c’était mieux avant » (dans les années 1950), il fantasme sur la réduction du déficit commercial et sur la réindustrialisation des Etats-Unis par la grâce des droits de douane. Sa dénonciation du libre-échange flirte avec une manière de paranoïa : les malheurs du pays, c’est la faute de l’étranger – et d’abord de l’Empire du milieu. Ce n’est pas ce qui s’est passé.
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