L’escalade meurtrière entre Israël et le Hezbollah libanais met une nouvelle fois en évidence l’impotence des Nations unies réunies au même moment en Assemblée générale annuelle à New York. Les chefs d’Etat et de gouvernement devaient se succéder à la tribune au cours de la dernière semaine de septembre pour respecter un rituel qui tourne depuis longtemps à vide. Deux conflits majeurs en cours, l’agression russe de l’Ukraine depuis février 2022 et la destruction de Gaza en représailles aux massacres sans précédent de civils israéliens par la milice du Hamas, en octobre 2023, ont mis en évidence la paralysie tragique de son échelon politique, le Conseil de sécurité, bloqué par les veto russes et américains.

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Ce multilatéralisme en panne ne dispose pas d’alternatives. L’Assemblée générale a certes multiplié les résolutions dont l’adoption ne nécessite que la majorité de ses membres. Elle s’est ainsi prononcée le 18 septembre pour la fin « dans les douze mois » de l’occupation israélienne des territoires palestiniens conquis par la force et occupés depuis plus d’un demi-siècle. Mais de telles décisions symboliques, que cette instance est incapable de traduire dans les faits, assimilent encore plus les Nations unies à un théâtre d’ombres.

Ce constat est d’autant plus désespérant que la corrosion de l’architecture internationale mise sur pied il y aura bientôt quatre-vingt-dix ans pour garantir un minimum de sécurité collective ne cesse de s’étendre. L’usage extensif de son veto par la Russie au bénéfice de ses clients le montre. Après en avoir usé en 2023 pour le Mali et la Syrie, Moscou a ainsi bloqué en mars la reconduction du mandat de surveillance des sanctions de l’ONU contre le régime de Pyongyang, devenu l’un de ses fournisseurs en armement.

Les experts font valoir à juste titre que les agences onusiennes, notamment celles chargées de la faim dans le monde ou du sort des réfugiés, continuent malgré tout de jouer un rôle indispensable aux côtés des laissés-pour-compte. Il n’empêche. Il serait plus que temps de relancer les mécanismes grippés permettant de tenter de répondre aux conflits les plus dévastateurs.

Statut bancal

L’indispensable réforme de ce Conseil de sécurité est hélas dans les limbes. Depuis sa création, l’instance n’a connu qu’une légère modification avec l’ajout de quatre sièges de membres non permanents. Sa composition est devenue une caricature de l’état du monde.

Avec sans nul doute des arrière-pensées géostratégiques, les Etats-Unis ont proposé le 12 septembre l’ajout d’un siège tournant supplémentaire au bénéfice de l’Amérique latine et un autre pour les petits Etats insulaires en première ligne face au réchauffement climatique. Washington a surtout plaidé pour que l’Afrique détienne deux sièges permanents en cas d’élargissement du Conseil de sécurité, mais sans qu’il soit question que ces sièges soient dotés d’un droit de veto. Ce statut bancal explique certainement le peu d’écho suscité par cette proposition, qui ne changerait strictement rien aux blocages actuels.

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Le paradoxe est que l’abandon auquel semblent condamnées les Nations unies coïncide avec un nombre croissant de crises : implosion d’Etats, du Soudan à Haïti en passant par la Birmanie, pandémies, vagues migratoires, crise climatique. Et toutes appellent des réponses multilatérales.

Le Monde

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