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Toutes celles et ceux qui ont grandi avec David et Marion, Petit Ours brun, Mimi Cracra et Tom-Tom et Nana peuvent se sentir orphelins. Celle qui, par son sens de l’écoute et le goût du partage comme du collectif, révolutionna la presse jeunesse au sein du groupe Bayard Presse, est morte à Paris, le 3 octobre, à l’âge de 90 ans.

Née à Lyon, le 4 novembre 1933, Marie-Josèphe Denoix de Saint-Marc troqua dès l’enfance son prénom, qu’elle n’aimait pas, contre celui de Mijo. Issue d’une antique lignée bourgeoise périgourdine, cette fille d’un inspecteur d’assurances, dont le frère aîné s’appelait Hélie de Saint-Marc (1922-2013) – un oncle dont elle fut très proche, l’affection tendre du jeune résistant, puis de l’officier, accompagnant toute sa jeunesse –, reçoit une éducation très chrétienne à l’institution des Dames du Sacré-Cœur à Bordeaux, avant son entrée à la faculté des lettres de Bordeaux.

Secrétaire générale de la Jeunesse étudiante chrétienne (JEC) féminine entre 1953 et 1956, elle est très liée à la Jeunesse agricole catholique, consultante à l’Institut de formation des cadres paysans jusqu’en 1965. Elle intègre alors La Maison de la bonne presse, qui devient bientôt Bayard Presse. Elle y seconde le projet de son mari, Yves Beccaria (1929-2017), qu’elle a épousé en juin 1956 et avec qui elle a eu quatre enfants.

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Gérant des éditions de l’Epi, maison chrétienne militante qui se préoccupe des jeunes lecteurs, et plus tard recruté par la Maison de la bonne presse, société éditrice du magazine Pèlerin et du journal La Croix, Yves s’engage en direction des tout-petits, lecteurs ou non. Quand il lance Pomme d’api en 1966, Mijo l’assiste, comme rédactrice (1967-1969), puis rédactrice en chef du mensuel (1969-1979), bientôt responsable du département enfants (1979-1987), quand Yves s’éloigne du domaine en devenant directeur général adjoint de Bayard Presse dès 1982.

Franchise et bon sens

Le couple, qui s’est formé dès les années JEC, partage convictions et engagement comme une foi chrétienne tournée vers l’écoute. La franchise et le bon sens guident la femme comme l’éditrice. Pour sa fille aînée, Anne, sourde de naissance, Mijo contacte la seule orthophoniste à Paris et lui confie la rééducation de son enfant : d’entrée, Pomme d’api prend en compte la linguistique et l’accessibilité du langage pour les enfants. Avec Anne-Marie de Besombes, fille de Michel et Fanny Lanternier, grands militants de l’approche didactique de Maria Montessori en France, le couple Beccaria opte pour une mission : Pomme d’api est destiné aux 3-6 ans, ceux qui ne lisent pas encore. D’où une palette hypercolorée, avec pour chaque numéro une dominante chromatique imposée aux illustrateurs et une vision de l’enfance qui se veut un miroir des émotions.

Mignons ou grognons, égoïstes ou généreux, les petits s’y retrouvent, goûtent, testent, expérimentent le monde. Et Mimi Cracra, une héroïne hardie imaginée par Agnès Rosenstiehl en 1975, est l’illustration même de ces joyeux paradoxes. Les « copains de papier » proposés par le mensuel mettront à contribution Danièle Bour pour Petit ours brun, Bernadette Després pour Tom-Tom et Nana, Noëlle Herrenschmidt pour David et Marion, plus tard Serge Bloch pour SamSam. Tous d’une inoxydable prospérité.

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Mijo Beccaria poursuit son engagement avec la création en 1977 de J’aime lire, destiné aux 7-12 ans, avec un roman complet accessible aux élèves du primaire, des jeux et des planches de BD, d’Astrapi, plus généraliste puisque bricolage ou cuisine ont leur entrée (1978) pour les 7-11 ans, ce qui conduit à repositionner le bimensuel Okapi (1971) sur les 11-15 ans, avec une vision documentaire approfondie. Phosphore, destiné aux années lycée, achevant le parcours, avec une place à l’actualité internationale comme aux débats de société.

Si, soucieuse de vérité et de transparence, Mijo Beccaria s’engagea sur le terrain des abus sexuels au sein de l’Eglise, au comité consultatif de la Conférence des évêques, elle garda l’irrespect joyeux d’une Mimi Cracra pour signer, avec Nicole Claveloux, un album réjouissant, Brune et Rose absolument insupportables !, qu’édita son fils Laurent, aux Arènes, en 2017.

Mijo Beccaria en quelques dates

4 novembre 1933 Naissance à Lyon

1956 Epouse Yves Beccaria

1965 Intègre La Maison de la bonne presse, futur groupe Bayard Presse

1966 Crée le mensuel « Pomme d’api »

1969-1979 Rédactrice en chef de « Pomme d’api »

1994 Devient directrice générale de Bayard Presse

2017 Cosigne « Brune et Rose absolument insupportables » (Les Arènes)

3 octobre 2024 Mort à Paris

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