Le 10e anniversaire des attentats de janvier 2015, contre Charlie Hebdo et l’Hyper Cacher, offre un regard rétrospectif sur l’histoire contemporaine de l’antiterrorisme à la française. Avec un texte tous les deux ans depuis 1986, la lutte contre le terrorisme illustre une approche répressive et préventive précoce, puis une extension plus récente vers une approche prédictive, en utilisant les ressorts de la police administrative, et une dissémination dans d’autres champs pénaux, à l’instar de la lutte contre le narcotrafic.

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Très tôt, la France a voulu réprimer durement le terrorisme sans utiliser de mesures d’exception. En 1986, à la suite d’une campagne d’attentats de grande ampleur, le gouvernement créa une législation originale, inscrite dans le droit commun afin de sortir des lois d’exception, comme l’ancienne Cour de sûreté de l’Etat, mais dérogatoire, afin de lutter contre la spécificité du terrorisme. La loi du 9 septembre 1986 constitue le socle historique du modèle national, qui repose sur plusieurs fondements : une législation spécifique sur le plan procédural, du jugement et de la peine ; une législation marquée par la centralisation des poursuites et de l’instruction et par la combinaison d’infractions classiques et d’une intention spécifique fondée sur une définition du terrorisme.

En 1996, à l’issue d’une nouvelle campagne terroriste, cette législation est complétée par la loi du 22 juillet 1996, qui institua une incrimination originale, l’association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste (AMT). L’AMT permet de poursuivre des individus sur la seule constatation de faits matériels concrétisant un projet criminel, avant la réalisation effective d’un attentat. Pendant de nombreuses années, ce dispositif préventif démontra son efficacité par l’absence d’attentats majeurs sur le sol français, tout en étant valorisé pour son respect des libertés fondamentales, à la différence de la réponse américaine après 2001, et cela grâce à la présence constante du juge judiciaire dans la procédure.

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