A l’heure où Benyamin Nétanyahou affiche sa volonté d’occuper l’ensemble de Gaza, il est décidé à faire de l’humanitaire un outil de la guerre, de la dépossession et de la colonisation. Si, après avoir de nouveau utilisé la famine et la pénurie comme armes depuis le blocus total mis en place le 2 mars, le premier ministre israélien a accepté, sous les pressions américaines, l’entrée d’un volume minimal de nourriture et de médicaments, le 19 mai, il entend en réalité remplacer à terme les échanges commerciaux et les acteurs humanitaires actuels par un système humanitaire militarisé.
Plusieurs centres de stockage de l’aide ont en effet commencé à être construits dans le sud du territoire, où est massé l’essentiel de la population – 70 % de l’enclave est, à ce jour, sous contrôle de l’armée ou fait l’objet d’ordres d’évacuation. L’objectif est que cette population soit regroupée dans trois zones dites « stériles », c’est-à-dire sans combattants ou membres du Hamas, créées au sein de l’enclave et entre lesquelles les mouvements seront contrôlés, de façon à faciliter ultérieurement le transfert des habitants hors de l’enclave.
Dans ces zones, un système de reconnaissance faciale algorithmique permettra à une société américaine privée émanant de la Gaza Humanitarian Foundation, fondée en Suisse en février, de distribuer des denrées stockées dans les centres cités plus haut à un membre de chaque famille préalablement doté d’un « laissez-passer sécuritaire ». Précisons que cette société est composée d’anciens de l’armée et des services de renseignement américains sans expérience reconnue dans l’humanitaire, et qu’elle prend la suite d’un projet similaire, celui de la Global Delivery Company – cyniquement vanté par son fondateur, Mordechai Kahana, comme un « Uber pour zones de guerre » ayant pour objectif de délivrer de l’aide dans de futures « bulles humanitaires » ou « cantons électroniques ».
Politique d’assiègement
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