La chute du gouvernement Bayrou à la suite d’un vote de confiance demandé par le premier ministre sans concertation préalable avec les forces parlementaires est au moins la deuxième décision politique absurde que les Français aient eu à endurer depuis un an, après la désastreuse dissolution de l’Assemblée nationale par le président de la République en juin 2024. Or, les mêmes causes produisent les mêmes effets : un exécutif solitaire campant sur son Aventin, prenant des décisions sans en référer à personne, face à des oppositions qui tirent à boulets rouges, parfois sans discernement, sur le gouvernement.

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Entre les deux, l’opinion manifeste son inquiétude face à une instabilité à laquelle elle n’est pas habituée, sa lassitude vis-à-vis des postures caricaturales des uns et des autres, voire son exaspération envers des responsables politiques plus préoccupés par la mise en scène de leurs divisions que par l’amélioration de la vie quotidienne des Français et de la situation du pays.

Il est possible de comprendre l’exaspération face à la foire d’empoigne qu’est parfois devenu le Parlement, mais on a tort de le livrer à la vindicte populaire. Il est en effet de bon ton d’accuser les partis politiques divisés d’être les principaux responsables de la paralysie actuelle. C’était le sens du discours de François Bayrou quelques heures avant sa chute, pointant l’irresponsabilité des forces d’opposition, incapables selon lui de compromis sur le budget. S’il est vrai que le Parlement français, contrairement à celui de nos voisins allemands, britanniques ou italiens, n’est pas connu pour sa capacité de négociation, c’est parce que sous la Ve République son rôle a toujours été limité, les oppositions étant impuissantes à peser sur la marche du pouvoir.

Incapacité à négocier

Qu’on ne s’y trompe pas : la crise que nous traversons depuis 2022 est avant tout celle de l’exécutif et de sa pratique du pouvoir. Celle du président, qui, malgré le désaveu de sa famille politique, refuse de jouer le jeu habituel des démocraties parlementaires en nommant un premier ministre chargé de former une majorité, même relative. Le choix de Sébastien Lecornu pour Matignon, un proche totalement inféodé au chef de l’Etat, s’inscrit dans la continuité et manifeste l’aveuglement d’un pouvoir qui préfère jouer la montre plutôt que de se remettre en cause. Cette critique vise également les récents premiers ministres qui ont jusqu’ici montré leur incapacité à négocier avec le Parlement.

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