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Par décret et sans avoir consulté grand monde, le gouvernement vient d’engager la petite révolution annoncée dès l’an passé : à partir de 2026, le recrutement des professeurs des écoles, ainsi que des professeurs certifiés du second degré, interviendra en fin de licence (bac + 3) et non plus de master (bac + 5).

Les mesures d’accompagnement sont nombreuses. Citons la rémunération des lauréats dès la première année après concours (1 400 euros puis 1 800 euros net) ; et en deuxième année, à mi-temps, un stage en responsabilité devant des élèves. Les universités devraient proposer des modules de préparation dès la rentrée 2025 et de nouvelles licences fléchées « professorat des écoles » à la rentrée 2026. Après le concours, les formations de master auront pour cadre les Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation (Inspé), à l’exception de certains enseignements disciplinaires que les départements universitaires pourront continuer à assurer.

L’argument est qu’il y a urgence. D’une part, l’échec scolaire a pris des dimensions inédites, avec des tests préoccupants tant en compréhension de l’écrit qu’en mathématiques : d’où la nécessité de placer devant les élèves des professeurs mieux préparés à gérer leurs difficultés. D’autre part, les vocations manquent : 3 000 postes sont restés non pourvus aux concours de 2024, d’où s’ensuivent, sur le terrain, casse-tête et solutions de fortune.

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Renforcer l’attrait du métier par des rémunérations plus précoces, et les compétences des enseignants par des formations restructurées : tel est donc le double objectif. A-t-on bien pris, au préalable, la mesure des problèmes à affronter ? C’est évidemment la question.

Improvisation dommageable

La crise des vocations d’abord. Voilà quarante ou cinquante ans, une part notable des meilleurs élèves de terminale se destinaient à l’enseignement. Pourquoi n’est-ce plus le cas aujourd’hui ? La crise, qui n’est pas que française, touche, plus ou moins, l’ensemble des métiers de l’humain, jusqu’à la médecine générale : dans ces branches, les compétences à acquérir sont multiples, les contraintes sévères, les pressions agressives et croissantes, et la rémunération ne suit pas. En outre, pour être incité à choisir l’enseignement, rien ne vaut la rencontre d’enseignants heureux ; mais combien sont-ils à présent ? C’est dire le poids de conditions structurelles sur lesquelles les pouvoirs publics font silence.

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