Difficile d’y échapper : le vaste sujet de l’immigration, sous toutes ses coutures, sert de carburant aux partis d’extrême droite à travers l’Europe, et entraîne ceux de la droite classique dans une dangereuse compétition avec cette extrême droite. Il place aussi les formations sociales-démocrates devant un dilemme qu’il leur est de plus en plus difficile d’éviter.

La question n’épargne pratiquement aucune démocratie de la région euro-atlantique. Incandescente dans le discours de l’ex-président républicain Donald Trump, elle a empoisonné le mandat de son successeur, Joe Biden, et pousse la vice-présidente, Kamala Harris, candidate démocrate à l’élection du 5 novembre, à rompre avec la rhétorique traditionnelle de son parti. Les sondages révèlent un écart important en faveur de Trump sur le sujet de l’immigration clandestine. Or ce sujet est crucial en Arizona, l’un des sept Etats-clés dans lesquels se jouera l’élection : frontalier du Mexique, l’Arizona est, comme le Texas, en première ligne des tensions migratoires.

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Le 27 septembre, Kamala Harris s’est donc rendue sur la frontière, en Arizona, pour affronter le sujet brûlant et elle a parlé clair. Elle qui, il y a quatre ans, pendant les primaires démocrates, s’engageait à dépénaliser les franchissements clandestins de la frontière, tient aujourd’hui un autre discours : « Les Etats-Unis sont un pays souverain, et je considère qu’il est de notre devoir d’imposer des règles sur notre frontière et de les faire respecter. »

« Avoir le contrôle »

Ce faisant, la candidate démocrate est consciente du risque qu’elle prend d’aliéner les courants de gauche de son parti. Le voilà, le dilemme : convaincre les électeurs qu’il est possible de conserver le contrôle des arrivées dans leur pays sans cautionner un traitement inhumain de populations civiles désespérées. Et là aussi, Kamala Harris parle clair – ou du moins essaie : « Je rejette ce choix fallacieux selon lequel nous devrions choisir entre sécuriser notre frontière et créer un système qui soit ordonné, sûr et humain. Nous pouvons et nous devons faire les deux. »

« Bullshit », rétorque Donald Trump, arc-bouté sur sa posture de diabolisation de migrants mangeurs d’animaux domestiques, qui reste, de son point de vue, électoralement plus payante.

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Ses émules européens n’en sont pas – encore ? – tout à fait là, mais la dynamique est la même de ce côté de l’Atlantique et les responsables politiques de gauche modérée sont confrontés au même défi que Kamala Harris. Une dirigeante sociale-démocrate, en particulier, la première ministre danoise, Mette Frederiksen, symbolise un « changement de paradigme » revendiqué par son parti : l’introduction d’une législation très restrictive sur les conditions d’entrée au Danemark a permis d’affaiblir l’extrême droite. Mette Frederiksen se maintient confortablement au pouvoir depuis 2019.

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