Livre. « Migrer, c’est une affaire d’hommes », de « pauvres », de gens « peu instruits », d’« Africains »… Il y a « de plus en plus » de migrants, ils vivent « au crochet de la société »… Sophie-Anne Bisiaux, membre du réseau d’associations, de militants et de chercheurs Migreurop, a listé 60 idées reçues sur l’immigration qu’elle entreprend de déconstruire dans la nouvelle édition d’En finir avec les idées fausses sur les migrations, parue aux Editions de l’Atelier (240 pages, 12,50 euros).
En ces temps politiques troublés, où l’immigration demeure un thème à la fois central et clivant, l’autrice souligne l’urgence de « lutter contre les préjugés sur les migrations, condition nécessaire d’un débat éclairé et apaisé ». « Il est temps que la politique se base sur des faits et non sur des fantasmes », écrit-elle. Si cet essai ne relèvera pas, seul, ce défi sisyphéen, il fournit néanmoins au lecteur quelques ressources précieuses pour y contribuer.
Non, les hommes ne sont pas les seuls à migrer, même si les routes qu’ils empruntent sont les plus médiatisées. Les femmes représentent près de la moitié des migrants internationaux dans le monde. Et « ce ne sont pas les plus pauvres qui migrent » car près des deux tiers des migrants internationaux sont originaires de pays à revenu intermédiaire. De même, près du quart des migrants internationaux sont nés en Europe et seulement 3 % de la population africaine vit en dehors de son pays d’origine, contre 8,5 % des Européens. Ou encore : les migrations internationales ont fortement augmenté, triplant entre 1970 et 2020 pour atteindre 281 millions de personnes, mais elles ont reculé en part relative puisqu’elles ne représentent que 3,6 % de la population mondiale, contre 5 % au début du XXe siècle.
Démarche rare
L’ouvrage – qui bénéficie d’un partenariat avec 21 organisations parmi lesquelles Amnesty International, Médecins du monde, la Ligue des droits de l’homme, la Cimade, Emmaüs Solidarité ou encore le Syndicat de la magistrature – s’attaque à une foule d’idées préconçues, en s’appuyant sur des données tangibles. Il aurait d’ailleurs peut-être dû se cantonner à ce décryptage pointilleux et documenté, car il se révèle un peu plus attendu et moins étayé lorsqu’il aborde les thématiques sécuritaires – l’enjeu de la lutte contre les réseaux de passeurs ou l’externalisation de la gestion des frontières européennes vers des pays tiers.
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