Khrouchtchev avait tort. Après la construction du mur de Berlin, en août 1961, le dirigeant de l’URSS pensait qu’il n’aurait pas à se préoccuper de Berlin-Ouest, puisque seuls des vieux y vivraient. Ce fut le contraire. Berlin-Ouest est devenue une ville de 2 millions d’habitants à nulle autre pareille.

Une ville où accourent les jeunes Allemands de l’Ouest qui ne veulent pas faire leur service militaire ; ils en sont exemptés. Une ville où l’on vit avec peu d’argent et où tout semble possible, ne rien faire ou vivre autrement. Une ville où l’on expérimente un quotidien sans limites, de la drogue à la gare du Jardin zoologique (Bahnhof Berlin Zoologischer Garten, dite Bahnhof Zoo) aux squats de Kreuzberg. Une ville où bars et restaurants peuvent rester ouverts toute la nuit. Une ville transformée en terrain de jeu unique pour l’art et les créateurs qui, de la musique au théâtre, attire le chanteur David Bowie ou le metteur en scène de théâtre Peter Stein.

Cette île du « monde libre » enclavée en territoire est-allemand, cogérée par la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, qui l’ont élevée en symbole de la guerre froide, existe pendant vingt-huit ans, jusqu’à la chute du Mur, le 9 novembre 1989. « C’était un endroit à l’écart du monde, que de nombreux étrangers avaient du mal à situer sur une carte ; pour eux, c’était ailleurs », dit Hanns Zischler, dans sa belle maison tapissée de livres et de photos, dans le quartier de Charlottenburg. Cet homme d’esprit élégant incarne un certain esprit de Berlin-Ouest, dont il est une figure de la vie artistique et intellectuelle.

« Une ville grande, grise, vide »

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