Elles étaient sœurs jumelles. A partir des années 1970, Colleen et Kathleen Kenyon se sont investies dans la photographie, en duo ou en solo : deux jolies brunettes, deux gouttes d’eau, qui se regardaient dans le miroir de l’autre, tout en développant, chacune, une approche personnelle du medium.

Nées à dix minutes d’intervalle, le 6 août 1951, les fillettes américaines s’essaient dès leur plus jeune âge à tous les arts. Peinture, céramique, tissage, elles profitent de l’énergique communauté artistique de Woodstock (Etat de New York), où elles passent leurs étés. De 10 à 14 ans, elles jouent aussi les enfants mannequins, une expérience qui laissera des traces. Avant même leurs 20 ans, elles se lancent dans la photographie, nourries des combats de la deuxième vague féministe.

Avec une ironie mordante, Kathleen s’approprie et détourne les clichés féminins véhiculés par les médias de masse, pour composer des photomontages proches à la fois du pop art et du surréalisme. Pour les concevoir, elle fouille dans les sacs remplis des images découpées dans la presse et classés par thème : un sac pour les fleurs, un pour la nourriture, un autre pour le médical et un pour les fragments du corps (« lèvres, yeux, oreilles », est-il étiqueté).

En admiratrice d’Hannah Höch, figure du collage dada, elle n’a de cesse de les agencer, superposer, recomposer, pour interroger les conventions de la famille nucléaire. Et, bien sûr, sa gémellité. Réalisée en 1978, sa série « Fitting » la met en scène avec ou sans sa sœur, en train de s’habiller, avec des gestes anodins dépourvus d’érotisme mais truffés d’absurde. Elle sera dévoilée au sein du mythique Woman’s Building de Los Angeles, centre artistique fondé par la pionnière de l’art féministe Judy Chicago.

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