
Quatre ans après la prise de pouvoir par des militaires, la Guinée a accepté le projet d’une nouvelle Constitution dont le but est de mettre fin à la période de transition.
A l’issue du référendum organisé dimanche auprès de quelque 6,7 millions d’électeurs, le « oui » l’a emporté à 89,38 % et le « non » a recueilli 10,62 %, selon les résultats provisoires officiels annoncés mardi 23 septembre soir par le ministre de l’administration du territoire et de la décentralisation guinéen, Ibrahima Kalil Condé, qui a mis en avant un taux de participation à 86,42 %. Les résultats définitifs seront annoncés par la Cour suprême, à une date qui n’a pas été précisée.
Espéré depuis des années par la population et la communauté internationale, ce scrutin a inauguré une séquence électorale cruciale dans ce pays d’environ 14,5 millions d’habitants, parmi les plus pauvres du monde et à l’histoire jalonnée de coups d’Etat et marquée par la violence de régimes autoritaires. Le ministre a estimé que le référendum s’était déroulé « dans un climat apaisé et fortement sécurisé ». Il a affirmé l’engagement du gouvernement « à œuvrer pour un processus électoral transparent, crédible et conforme aux principes démocratiques de notre République ».
Main de fer
Cette Constitution remplace la « Charte de la transition » établie par la junte après le coup d’Etat et qui interdisait notamment à ses membres de se présenter aux élections. Or, cette interdiction ne figure plus dans la nouvelle Constitution, ouvrant la voie à une candidature de Mamadi Doumbouya, chef de l’Etat et chef des armées. Tout semble indiquer que M. Doumbouya sera candidat, en dépit de sa promesse de ne pas se présenter à une présidentielle.
Accusant la junte de vouloir se maintenir au pouvoir à la faveur de ce référendum, les leaders de l’opposition avaient appelé au boycott, dénonçant une « mascarade électorale » aux résultats « connus d’avance ». Malgré cet appel, nombre de Guinéens se sont donc rendus aux urnes. Les électeurs interrogés par l’Agence France-Presse (AFP) ont affirmé en majorité avoir voté pour exprimer leur volonté de sortir de la transition militaire.
Les militaires s’étaient initialement engagés à rendre le pouvoir aux civils avant fin 2024. Depuis qu’il a renversé le président civil élu Alpha Condé en 2021, le chef de la junte Mamadi Doumbouya, 40 ans, dirige le pays d’une main de fer. La junte a multiplié les restrictions contre les libertés.
Une campagne ostentatoire pour le « oui »
Dimanche, le vote à travers le pays s’est globalement déroulé dans le calme alors que pas moins de 45 000 agents des forces de défense et de sécurité avaient été mobilisés pour sécuriser le vote, ainsi qu’un millier de véhicules légers et blindés et des hélicoptères de combat.
Restez informés
Suivez-nous sur WhatsApp
Recevez l’essentiel de l’actualité africaine sur WhatsApp avec la chaîne du « Monde Afrique »
Rejoindre
Newsletter
« Le Monde Afrique »
Chaque samedi, retrouvez une semaine d’actualité et de débats, par la rédaction du « Monde Afrique »
S’inscrire
La campagne pour le « oui » au référendum a été ostentatoire à travers le pays et largement incarnée par Mamadi Doumbouya, à grand renfort d’affiches à son effigie, rassemblements et fanfares. Celle du « non » avait, elle, été quasi inaudible.
Une chape de plomb s’est abattue en Guinée sur les voix dissidentes depuis l’arrivée des militaires au pouvoir. Plusieurs partis politiques et médias ont été suspendus, les manifestations – interdites depuis 2022 – sont réprimées, et de nombreux dirigeants de l’opposition ont été arrêtés, condamnés ou poussés à l’exil. Les disparitions forcées et enlèvements se sont multipliés.
L’organisation du référendum permet à la junte de donner le change aux exigences d’élection de la communauté internationale et des bailleurs. Les autorités souhaitent se « normaliser » et renouer avec les organisations régionales et internationales. Elles ont donc annoncé des élections présidentielle et législatives pour assurer un retour à l’ordre constitutionnel avant la fin de cette année. Néanmoins, aucune date n’a été donnée.