
Quatre ans après la prise de pouvoir par des militaires, les Guinéens ont approuvé une nouvelle Constitution, selon les résultats définitifs annoncés vendredi 26 septembre au soir par la Cour suprême, à l’issue d’un référendum visant à la fin de la transition, mais qui ouvre la voie à une candidature du chef de la junte, Mamadi Doumbouya, à une future présidentielle.
Espéré depuis des années par la population et la communauté internationale, ce scrutin a inauguré une séquence électorale cruciale dans ce pays parmi les plus pauvres du monde et à l’histoire jalonnée de coups d’Etat et marquée par la violence de régimes autoritaires.
Les résultats définitifs – soit 89,38 % pour le « oui » et 10,62 % pour le « non » – confirment les résultats provisoires annoncés mardi soir. Ils ont été communiqués vendredi soir par le premier président de la Cour suprême, et retransmis en direct sur la Radio Télévision de Guinée (RTG).
Dans la foulée, un décret du président Mamadi Doumbouya, lu à la télévision nationale, a promulgué la nouvelle Constitution.
« Mascarade électorale »
Les Guinéens avaient voté dimanche sur ce projet de nouvelle Constitution visant à la fin de la transition militaire et pour lequel les leaders de l’opposition avaient appelé au boycott, accusant le chef de la junte de vouloir se maintenir au pouvoir à la faveur de ce référendum. Ils ont dénoncé une « mascarade électorale » aux résultats « connus d’avance ». Les juges de la Cour suprême ont également examiné et rejeté un recours d’une coalition de partis d’opposition déposé plus tôt, vendredi, et qui réclamait l’annulation du référendum.
Depuis qu’il a renversé le président civil élu Alpha Condé en 2021, Mamadi Doumbouya, 40 ans, dirige le pays d’une main de fer. La junte a multiplié les restrictions contre les libertés.
La nouvelle Constitution doit permettre l’organisation d’élections pour mettre fin à la transition depuis la prise de pouvoir des militaires. Ces derniers s’étaient initialement engagés à rendre le pouvoir aux civils avant fin 2024. L’organisation du référendum a permis à la junte d’aller dans le sens des exigences d’élection de la communauté internationale et des bailleurs. Les autorités souhaitent se normaliser et renouer avec les organisations régionales et internationales. Elles ont donc annoncé des élections présidentielle et législatives pour assurer un retour à l’ordre constitutionnel avant la fin de cette année, sans préciser de date.
Mercredi, le premier ministre, Amadou Oury Bah, a réaffirmé que des élections « seront programmées cette année », considérant le « oui » massif au projet de nouvelle Constitution comme un « mandat de confiance ». Malgré l’appel au boycott de l’opposition, nombre de Guinéens se sont rendus aux urnes. Les électeurs interrogés par l’Agence France-Presse (AFP) ont affirmé en majorité avoir voté pour exprimer leur volonté de sortir de la transition militaire.
Chape de plomb
Une chape de plomb s’est abattue en Guinée sur les voix dissidentes depuis l’arrivée des militaires au pouvoir. Plusieurs partis politiques et médias ont été suspendus, les manifestations – interdites depuis 2022 – sont réprimées, et de nombreux dirigeants de l’opposition ont été arrêtés, condamnés ou poussés à l’exil. Les disparitions forcées et les enlèvements se sont multipliés.
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Les électeurs interrogés par l’AFP dimanche étaient partagés entre ceux souhaitant ardemment le retour des civils au pouvoir et d’autres soutenant le chef de la junte et sa potentielle candidature à une future présidentielle.
Cette Constitution remplace en effet la « Charte de la transition », établie par la junte après le coup d’Etat et qui empêchait notamment à ses membres de se présenter aux élections. Or, cette interdiction ne figure plus dans la nouvelle Constitution, ouvrant la voie à une candidature de Mamadi Doumbouya. Tout semble indiquer qu’il sera candidat, en dépit de sa promesse de ne pas se présenter.
Jeudi, le Haut-Commissaire des nations unies aux droits de l’Homme, Volker Türk, a demandé à la Guinée de lever, avant les prochaines élections, les « interdictions, tout simplement inacceptables », visant les partis d’opposition et les médias.