Que contient la loi Duplomb ?
La loi Duplomb, au coeur d’une pétition critiquant son impact sur l’environnement et la santé qui affole les compteurs sur le site de l’Assemblée nationale, a pour objectif de redonner de la compétitivité aux agriculteurs en allégant certaines contraintes.
Définitivement adopté le 8 juillet après des débats enflammés, le texte, porté par le sénateur Laurent Duplomb pour « lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur », est visé par la pétition d’une étudiante qui a atteint le nombre record d’1,3 million de signatures, ouvrant ainsi la voie à un débat devant les députés, mais sans réexamen du texte sur le fond ni abrogation a priori.
Présenté par ses défenseurs comme une des réponses à la crise du monde agricole de 2024, le texte contient plusieurs mesures controversées :
- Retour dérogatoire de l’acétamipride
La plus critiquée est la réintroduction encadrée et à titre dérogatoire de l’acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes, interdit depuis 2018 en France mais autorisé en Europe jusqu’en 2033.
Elle était réclamée par l’alliance FNSEA-Jeunes agriculteurs et la Coordination rurale, les premiers syndicats agricoles, notamment pour les producteurs de betteraves sucrières qui affirment n’avoir aucune solution pour protéger efficacement leurs cultures. Les planteurs redoutent la concurrence d’importations de sucre produit avec des pesticides interdits en France.
Le retour des néonicotinoïdes, très toxiques pour les abeilles, est décrié par les défenseurs de la nature, les apiculteurs, la Confédération paysanne (3e syndicat agricole), mais aussi des régies publiques de l’eau et des scientifiques qui ont récemment alerté sur la « persistance » de ces substances dans l’environnement et les risques pour la santé.
- Fonctionnement de l’Agence nationale de sécurité sanitaire
Autre enjeu du texte, le rôle de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses), mandatée depuis 2015 pour évaluer la dangerosité des pesticides, mais aussi autoriser leur mise sur le marché. Le texte de compromis prévoit que l’Agence, lorsqu’elle examine la mise sur le marché et l’utilisation de produits phytopharmaceutiques, devra tenir compte « des circonstances agronomiques, phytosanitaires, et environnementales, y compris climatiques qui prévalent sur le territoire national ».
- Agents de l’Office français de la biodiversité
Quant aux agents de l’Office français de la biodiversité (OFB), chargé de la police de l’environnement, ceux-si sont à présent équipés de « caméras individuelles ». L’établissement public avait été critiqué par le premier ministre François Bayrou, qui avait qualifié de « faute » certaines inspections d’agents de l’OFB chez des agriculteurs, « une arme à la ceinture ».
- Stockage de l’eau et zones humides
Le texte vise également à faciliter le stockage de l’eau pour l’irrigation des cultures, dans un contexte de raréfaction de la ressource liée au dérèglement climatique.
Des associations ont mis en garde contre « l’implantation de méga-bassines », ces immenses réserves constituées l’hiver en puisant dans la nappe phréatique ou les cours d’eau, « qui accaparent » les ressources en eau « au profit de l’agriculture intensive ».
Avec le texte, il y aura désormais une présomption d’« intérêt général majeur » pour les ouvrages de stockage, dans l’intention de faciliter les procédures pour obtenir des autorisations de construction.
- Agrandissement des élevages
Du côté de l’élevage, la loi facilite l’agrandissement ou la création de bâtiments d’élevage intensif. Il permet notamment, lors de l’enquête publique, de remplacer la réunion publique par une permanence en mairie. Il relève également les seuils de cheptel au-delà desquels les élevages doivent être enregistrés ou obtenir une autorisation : de 40 000 poulets actuellement à 85 000 avec la loi et de 2 000 cochons à 3 000.