L’Allemagne stagne. Le PIB est stable depuis 2019. Les exportations n’augmentent plus. La production automobile a baissé de presque 30 % par rapport à son pic de 2016. Les causes de cette chute sont structurelles : la Chine s’est métamorphosée en exportateur concurrent. Le pari sur le gaz russe s’est révélé contre-productif. Et avec le second mandat de Donald Trump, ni le marché américain ni un approfondissement de la mondialisation ne sont susceptibles de venir à la rescousse de l’Allemagne.

Dans cette situation, le pays a besoin d’une nouvelle vague d’investissements publics et privés afin d’abaisser les coûts, de relancer la productivité et de réorienter l’économie vers de nouveaux marchés. Mais, dans le même temps, la hausse des dépenses militaires et l’augmentation des coûts de la santé et des retraites pèsent sur les budgets.

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L’économie est dans l’ornière, et il n’existe aucun moyen facile de l’en extraire. Comme une jeune personne ambitieuse dont la carrière s’est enrayée au niveau cadre moyen, l’Allemagne prend soudain conscience du fossé de plus en plus large entre ses aspirations et la réalité. Les espoirs tournent à la désillusion, les choix font place aux regrets – essayez seulement de prononcer le mot « nucléaire ».

Quantitativement, l’écart est profond. La stagnation a commencé en 2019. A la fin de 2024, le PIB était inférieur de 370 milliards d’euros (soit environ 9 %) à ce qu’il aurait été si la croissance s’était poursuivie au même rythme que durant la décennie 2010. Un montant quasiment équivalent au PIB du Danemark.

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Qualitativement, il est catastrophique. L’identité de la République fédérale s’est construite autour de la réussite économique. A partir des années 1950, c’est la Wirtschaftswunder (le « miracle économique ») qui a permis aux Allemands de l’Ouest de recouvrer leur fierté. Comme source de sens collectif, ce sentiment est né plus tôt et s’est inscrit plus profondément que d’autres éléments de l’identité ouest-allemande, tels que l’assomption du passé, qui se développe à partir de 1968, ou la politique environnementale, qui occupe le devant de la scène depuis les années 1980 et l’essor des Verts. Cette centralité a été à la fois répercutée et renforcée par la réunification. Après la chute du mur de Berlin, les Allemands de l’Est ont rapidement exigé l’union monétaire : « Si le deutschemark vient ici, nous resterons. S’il ne vient pas, nous irons là où il est », c’est-à-dire en Allemagne de l’Ouest.

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