Elle est économe, ponctuelle, cuisine les légumes de son jardin, parle peu et, à l’exception de sa Mercedes, fuit l’ostentation. Elle, c’est la « schwäbische hausfrau », la « femme au foyer souabe », archétype de la bonne gestionnaire dans l’imaginaire collectif allemand, popularisée au-delà des frontières par l’ancienne chancelière Angela Merkel pour expliquer la crise des subprimes. « En réalité, les choses sont très simples, avait-elle alors ironisé, dans un discours au congrès de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) en décembre 2008. On aurait dû poser la question à une ménagère souabe, ici, à Stuttgart, dans le Bade-Wurtemberg. Elle aurait pu nous répondre par un dicton aussi bref que juste : “On ne peut pas vivre longtemps au-dessus de ses moyens”. »
Dix-sept ans plus tard, la femme au foyer souabe n’a pas pris une ride. Aucune autre figure n’incarne mieux qu’elle l’orthodoxie budgétaire allemande et ses vertus supposées : la sacro-sainte stabilité de la monnaie et des prix. La seule évocation du personnage suffit à crédibiliser celui qui le nomme. L’ancien ministre des finances Wolfgang Schaüble (2009-2017), qui n’avait pourtant rien à prouver, aimait rappeler que sa propre mère était Souabe.
En toute logique, il fut à son tour le père du « frein à la dette », cette disposition introduite dans la Constitution en 2009, qui restreint le recours au déficit public et à l’endettement de façon plus stricte encore que les critères de Maastricht. L’un comme l’autre continuent de hanter le débat politique, dans une Allemagne qui s’apprête à se rendre aux urnes pour les élections législatives du 23 février.
Un mythe populaire
Désireux de se démarquer d’Angela Merkel, le candidat du parti conservateur, Friedrich Merz, probable prochain chancelier, n’a pas repris la métaphore de la ménagère souabe de façon explicite. Mais, conscient de la popularité du mythe dans le pays, il assume un discours austéritaire bien plus radical que l’ancienne chancelière.
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