C’est une piste de sable, bien cachée dans les pins, sur l’autoroute qui relie Kiev à Odessa, dans la région de Hatne. L’ébauche d’une bretelle fraîchement creusée par des bulldozers, pas encore signalisée, laisse deviner un énorme chantier. Il s’agit de la sortie d’autoroute qui desservira le futur mémorial militaire de l’Ukraine. Un projet gigantesque, hautement sensible, et pas seulement parce que des écoactivistes et les habitants du petit village de Markhalivka, à 40 kilomètres de la capitale mais au pied du futur cimetière, s’inquiètent pour la déforestation ou la tranquillité du coin.

Dans le village, seul un panneau brun tout neuf, couleur réservée aux sites nationaux, signale pour le moment la route qui mène les camions au chantier. Il est écrit en anglais : « National Military Memorial Cemetery », cimetière militaire national. Un premier carré de 10 000 sépultures, déjà partiellement parsemé de larges allées de granit clair, bordées de bancs et de tilleuls, accueillera cet été la première dépouille de « héros ». Mais, à terme, ce sont « 130 000, voire 160 000 » défunts que ce futur site mortuaire s’apprête à recevoir, précise, sous le soleil éclatant d’un samedi de juillet, l’architecte Serhi Derbin, pantalon de lin kaki et panama de paille.

« Ici, la future entrée, explique le jeune homme à la tête de ce projet de plus de 37 millions d’euros. En dessous, un abri pour 300 personnes, en cas de bombardements. » Un vrai bunker, une première pour un cimetière. Là-bas encore, une « maison du deuil » pour les cérémonies, en cas de froid ou de pluie. « Et, ici, le mémorial », poursuit l’architecte en dessinant dans un large moulinet de bras les 120 hectares destinés au futur cimetière, et l’horizon de 260 hectares de domaine.

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