
L’AVIS DU « MONDE » – À VOIR
Un long plan-séquence dans un terrain vague : un vieux pick-up file à toute allure, des enfants à bord encouragent une chienne à courser le lièvre qui pourrait s’échapper dans la poussière… Au volant, un homme barbu (Jesus Fernandez Silva), à l’arrière, son petit-fils, Toni (Antonio Fernandez Gabarre), couvant du regard son lévrier, Atomica.
En un seul plan, Ciudad sin sueño, de l’Espagnol Guillermo Galoe, réussit à condenser tout ce qui fait le bonheur de ce grand-père et de cet adolescent, habitants du quartier de la Cañada Real, à une quinzaine de kilomètres de Madrid : cet immense bidonville est pour eux un grand espace de jeu, pareil à nul autre, synonyme de liberté, de lâcher-prise, quand bien même les maisons sont en train d’être détruites à coups de pelleteuses. Les démolisseurs, oiseaux de mauvais augure, semblent annoncer le départ prochain, la fin programmée d’une vie précaire mais irremplaçable sur le plan des liens tissés au sein de la communauté.
Sélectionné à la Semaine de la critique, à Cannes, ce premier long-métrage de fiction a été tourné pendant plusieurs années avec les habitants de la Cañada Real. Le réalisateur, né à Madrid, avait à cœur de rendre compte des états d’âme des personnages : certains sont prêts à partir et à s’installer dans les appartements modernes qu’on leur fait miroiter ; d’autres sont viscéralement attachés à cet endroit, à ces repas pris en famille, à ces soirées où les petits se pressent autour des grands, visages illuminés par les feux de camp.
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