Les Etats-Unis n’ont pas ménagé leurs efforts au cours de la dernière décennie pour prévenir tous les pays, et surtout ceux en développement, du risque d’accepter les financements chinois. L’idée dominait alors que les prêts de l’Etat chinois et de ses banques publiques se dirigeaient d’abord vers ces nations à l’économie émergente pour y construire des infrastructures (et des loyautés) le long des « nouvelles routes de la soie ». Une étude méticuleuse publiée récemment remet profondément en cause cette lecture de la diplomatie chinoise des crédits.

Le rapport « Chasing China », publié le 18 novembre par le laboratoire AidData de suivi des financements publics internationaux à l’université William & Mary, située en Virginie (Etats-Unis), démontre au contraire que plus des trois quarts des prêts chinois soutiennent désormais des projets dans des pays riches ou à revenus intermédiaires. « La plupart des prêts aux pays riches sont focalisés sur des infrastructures critiques, des minerais stratégiques et des acquisitions d’actifs dans la haute technologie, telles que des entreprises dans les semi-conducteurs », a expliqué Bradley Parks, directeur d’AidData.

Priorités de Pékin

Leur enquête est la plus poussée qui ait été réalisée pour donner une vision d’ensemble des priorités des financements chinois, d’organismes de prêts au développement et de banques publiques telles que la Bank of China, cherchant à la fois la rentabilité commerciale et l’alignement au service des priorités de Pékin. L’équipe, composée de 16 chercheurs à plein temps et de plusieurs dizaines d’autres temporaires, a passé trois ans à étudier 30 000 dons et prêts chinois, effectués au cours de la période 2000-2023. Ils portent sur un montant de 2 200 milliards de dollars (1 891,41 milliards d’euros), deux à quatre fois plus élevé que les estimations précédentes.

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Ils constatent que le financement des infrastructures de par le monde n’est plus majoritaire : pour 4 dollars prêtés à de tels projets, la Chine en débloque 6 sur des activités totalement différentes. Malgré le projet des « nouvelles routes de la soie » lancé en 2013, un autre programme a réorienté ses priorités deux ans plus tard : le plan Made in China 2025 a mis le cap vers la domination technologique. La part des prêts pour réaliser des acquisitions dans des domaines « sensibles » est passée de 46 % du total en 2015 à 88 % en 2023.

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