Au départ, c’était un peu un hasard. La pénétration, Julie (le prénom a été changé) et son compagnon s’en sont passés par commodité, le temps d’un road trip en sac à dos de plusieurs mois en Asie, en 2019. « Quand on dort en auberge de jeunesse ou dans des chambres sans salle de bains, ce n’est pas ce qu’il y a de plus pratique, ni de plus hygiénique pour moi », raconte la Nantaise de 29 ans. Un soir, un peu éméchés, ils ont commencé à se masturber l’un devant l’autre, ce qu’ils n’avaient jamais fait auparavant. Ils ont adoré. Pendant ce voyage, ils ont donc opté pour d’autres pratiques : sexe oral, caresses… ces pratiques que l’on nomme encore « préliminaires » dans une sexualité hétérosexuelle focalisée sur la pénétration d’un vagin par un pénis.

C’était il y a bientôt six ans, et depuis, ils ne sont revenus que quelquefois à des rapports avec pénétration. « Je préfère notre sexualité aujourd’hui, confie Julie. J’ai un orgasme à chaque fois. C’était beaucoup plus rare avant. Maintenant, quand je suis excitée, j’ai plus envie d’un cunnilingus que d’une levrette. »

Pour eux, ce changement de sexualité a aussi été synonyme de renouveau : en couple depuis leurs 19 ans, ils avaient un peu perdu de vue leur désir. Sortir du cadre de la sexualité pénétrative leur a permis de se redécouvrir et de varier les plaisirs.

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Comme Julie et son conjoint, les moins de 30 ans sont de plus en plus nombreux à pratiquer une sexualité sans pénétration. D’après l’enquête « Contexte des sexualités en France » (Inserm, ANRS-Maladies infectieuses), l’activité sexuelle est en baisse. En 2023, les 18-29 ans étaient 79 % à avoir eu un rapport sexuel au cours des douze derniers mois, contre près de 84 % en 2006. « Mais ce que la majorité des personnes appellent “rapport sexuel” est un rapport avec pénétration vaginale », explique Armelle Andro, démographe à l’université Paris-I, et l’une des coordinatrices de l’enquête. En parallèle, les pratiques non pénétratives, comme le sexe oral ou la masturbation, connaissent une très forte augmentation.

Question de jouissance

Les sexologues constatent cette évolution au sein de leurs cabinets. Capucine Moreau, praticienne à Toulouse, remarque qu’« aujourd’hui, une partie des moins de 40 ans admettent très tranquillement que la pénétration n’est pas le nec plus ultra, et adaptent leurs pratiques ». Cette remise en question est d’abord une question de jouissance : selon Nathalie Bajos, directrice de recherche à l’Inserm ayant coordonné l’enquête, « la pénétration vaginale n’est pas source de plaisir pour toutes les femmes, elle est donc moins pratiquée qu’avant, au profit d’autres formes de sexualité ».

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