En s’opposant à l’impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des 1 800 Français détenant plus de 100 millions d’euros adopté par l’Assemblée nationale, le Sénat vient de montrer à quel point il était déconnecté des enjeux de notre époque. Ce n’est pas nouveau : entre 1896 et 1914, le Sénat avait déjà bloqué l’impôt sur le revenu, avec des arguments aussi fallacieux qu’aujourd’hui. Mais rassurons-nous : les besoins de financement liés aux défis sociaux et climatiques et à la dette publique sont tellement considérables que ces blocages ne résisteront pas longtemps face aux réalités économiques, politiques et environnementales, qui imposeront très vite des mesures de redistribution autrement plus radicales.

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Reprenons d’abord les arguments du Sénat et des macronistes. Un impôt confiscatoire ? L’idée n’a pas beaucoup de sens. D’après le magazine Challenges, qui n’est pas un repaire de gauchistes, les 500 plus grandes fortunes sont passées de 200 milliards d’euros à 1 200 milliards entre 2010 et 2025, soit une progression de 500 %. Avec une taxe de 2 % par an, il faudrait un siècle pour les faire revenir à leur niveau de 2010, à supposer qu’elles ne gagnent aucun revenu dans l’intervalle. Ce qui n’a pas beaucoup de sens vu qu’elles se sont enrichies de 7 % à 8 % par an au cours des quinze dernières années.

L’exil fiscal ? La loi adoptée par l’Assemblée prévoit un premier mécanisme pour y faire face : les milliardaires continuent d’être soumis à l’impôt plancher cinq ans après leur départ, ce qui limite l’intérêt de l’exil. Il faut aller plus loin : à partir du moment où l’on a bâti sa fortune en s’appuyant sur les infrastructures du pays, son système éducatif et sanitaire, il n’y a aucune raison que l’on échappe aussi vite aux charges communes permettant de financer le système en question. On pourrait décider, par exemple, d’appliquer l’impôt en fonction du nombre d’années passées en France. Un contribuable résidant depuis un an en Suisse après cinquante années en France continuerait de payer 50/51e de l’impôt dû par un résident français. Ceux qui refuseraient de payer se mettraient hors la loi et encourraient les sanctions correspondantes (saisie de biens, interpellation à l’aéroport), comme tout un chacun.

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