Le Mexique est-il au bord de la crise institutionnelle ? La démission, mercredi 30 octobre, de huit des onze juges de la Cour suprême, dont sa présidente Norma Lucia Pina, est le dernier chapitre d’un malaise qui n’a fait que croître depuis le 15 septembre, date de l’approbation de la réforme judiciaire proposée par l’ancien président Andres Manuel Lopez Obrador (gauche), surnommé « AMLO », et défendue par sa successeure, Claudia Sheinbaum.
Cette réforme prévoit l’élection populaire des 1 690 juges, magistrats et membres des hautes cours de justice. Pour être reconduits dans leurs fonctions, ces fonctionnaires devront désormais se présenter devant les électeurs en juin 2025. Cette réforme est rejetée en masse par ces mêmes fonctionnaires, qui sont en grève depuis la fin du mois d’août.
L’abdication des huit « ministres » de la Cour suprême, la plus haute instance judiciaire du pays, qui indiquent tous dans leur lettre de démission, adressée au Sénat, refuser de se soumettre au vote populaire, est « une fronde inédite dans notre histoire », souligne Mélissa Ayala, avocate constitutionnaliste.
Les huit juges démissionnaires demeureront en poste jusqu’à la prise de fonction, en août 2025, de leurs remplaçants. Mardi 5 novembre, la Cour suprême examinera les 366 pages du projet d’arrêt de l’un des leurs, Juan Luis González Alcantara, qui porte justement sur la réforme judiciaire. La considérant inconstitutionnelle, ce magistrat propose de la retoucher en rejetant l’élection populaire pour les juges, sauf pour les ministres de la Cour suprême. Il veut également supprimer les baisses de salaire pour les magistrats en poste mais les maintenir pour les générations futures. Le juge a présenté son projet d’arrêt comme « une issue à une crise constitutionnelle qui permet de retrouver une normalité dans la relation entre les pouvoirs de la nation ».
« La majorité du peuple veut un changement »
Mais pour la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum, il s’agit d’un abus de pouvoir de la part des plus hauts magistrats. « Les juges ont le droit de ne pas être d’accord avec cette réforme mais la majorité du peuple veut un changement profond du système judiciaire, a-t-elle affirmé lors d’une conférence de presse, mercredi. La réforme a été adoptée en suivant scrupuleusement les règles et la Cour ne peut pas revenir sur une réforme de la Constitution. Du reste, elle n’a jamais retouché les réformes constitutionnelles qui privatisaient notre patrimoine mais elle voudrait le faire quand on touche à ses intérêts. »
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