
Un gang armé a attaqué, dimanche 6 juillet, le siège de la Commission kényane des droits humains, où se tenait une conférence de presse appelant à la fin des brutalités policières, a rapporté l’Agence France-Presse (AFP).
Le pays est confronté à une vague de contestation contre la stagnation économique, la corruption et les brutalités policières sous la présidence de William Ruto, manifestations lors desquelles des bandes armées sont accusées d’agir à la solde des autorités. Les dernières manifestations de la fin juin ont dégénéré en pillages et violences, qualifiées de « tentative de coup d’Etat » par le gouvernement, et ont fait 19 morts et des centaines de blessés.
La conférence de presse de la Commission des droits humains se déroulait avant la « Journée Saba Saba » de lundi, commémoration annuelle des manifestations prodémocratie des années 1990. Un journaliste de l’AFP présent au siège de la Commission a vu une bande d’une dizaine de personnes, certaines armées de bâtons, a fait irruption dans les locaux de la commission, juste avant le début des prises de parole.
La porte était fermée à clé mais le gang armé est entré de force. « Vous organisez des manifestations ici », ont-ils lancé aux personnes présentes, qu’ils ont également dépouillées, a constaté le journaliste.
Des bandes armées, dites goons au Kenya, sont régulièrement déployées pour attaquer les manifestations et sont soupçonnées d’être payées par les autorités. « Des goons armés ont attaqué les bureaux de la commission kényane des droits de l’homme », a accusé sur X l’ONG Women’s Collective, coorganisatrice de la conférence de presse.
Scandales de corruption
Le 17 juin, des manifestants défilant contre les violences policières ont ainsi été attaqués par des centaines d’hommes à moto armés de fouets et de gourdins. Les journalistes de l’AFP présents sur place ont vu ces hommes agir sous la protection apparente de la police, et certains ont ouvertement déclaré qu’ils avaient été payés par des représentants des autorités locales.
Les manifestants dénoncent une montée en flèche du coût de la vie et une élite politique impliquée dans de multiples scandales de corruption.
Sur le plan politique, le président Ruto reste en position de force, ayant forgé une alliance avec le principal chef de l’opposition, Raila Odinga, avant la présidentielle de 2027. Mais chaque répression, comme l’attaque de dimanche contre la commission, alimente la colère, analyse l’activiste Nerima Wako. « Chaque fois qu’une manifestation est organisée, ils tuent plus de personnes, ce qui fait que la situation continue de s’alimenter d’elle-même », a-t-elle déclaré.
Le Kenya commémore lundi le « Saba Saba » (« sept sept » en swahili), le septième jour du septième mois, quand l’opposition s’est levée en 1990 pour demander le retour du multipartisme et de la démocratie dans un pays alors dirigé d’une main de fer par l’autocrate Daniel arap Moi.
Restez informés
Suivez-nous sur WhatsApp
Recevez l’essentiel de l’actualité africaine sur WhatsApp avec la chaîne du « Monde Afrique »
Rejoindre
Le gouvernement du président Ruto, lui-même partisan de Daniel arap Moi à l’époque de ces répressions, « semble essayer de répéter les années 1990, mais nous ne sommes plus dans les années 1990 », analyse Gabrielle Lynch, experte en politique africaine à l’université britannique de Warwick. « Ils ne semblent pas avoir réalisé que le monde est différent. Les gens sont plus conscients des enjeux politiques. L’environnement de communication a également changé de manière spectaculaire avec l’essor des médias sociaux », ajoute-t-elle.