Ghana : « Je suis en position. » Brésil : « OK. Quelle est la marche à suivre ? » Allemagne : « On attend. » Il est 20 h 45, ce jeudi 15 décembre 2022, à Brasilia. Le soleil est couché, l’orage menace. Dans cette capitale à l’architecture futuriste, à quelques jours des vacances d’été, tout est calme et silencieux. Sereine, la cité s’assoupit, emplie de parfums boisés de la savane du Cerrado. Mais dans l’obscurité, six hommes sont à l’affût, dispersés en plusieurs points de la ville. Chacun dispose d’un nom de code – « Allemagne », « Argentine », « Autriche », « Brésil », « Ghana » et « Japon » –, d’un smartphone enregistré au nom d’un tiers, d’armes de poing et d’explosifs. Tapis dans l’ombre, ils attendent le passage d’un véhicule. Leur objectif ? Sonner le début d’un coup d’Etat.

En ligne de mire, Alexandre de Moraes, puissant juge au Tribunal suprême fédéral (TSF) et président du Tribunal supérieur électoral (TSE), mais aussi Luiz Inacio Lula da Silva et son colistier Geraldo Alckmin, vainqueurs de la présidentielle d’octobre 2022, et qui doivent prendre leurs fonctions quinze jours plus tard, le 1er janvier 2023. Tous ont vocation à être capturés ou assassinés afin que le chef de l’Etat sortant, Jair Bolsonaro, se maintienne au pouvoir malgré sa défaite dans les urnes.

Vertigineuses et gravissimes, ces révélations sont issues d’un rapport de la police fédérale brésilienne dévoilé le 26 novembre. Celui-ci fait la lumière sur un projet de putsch orchestré en 2022 au plus haut sommet de l’Etat, et qui a manqué de peu d’aboutir. Le Monde a consulté les 884 pages de ce document explosif, qui relate cette période où l’histoire du Brésil a failli basculer.

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