Sidérantes, terrifiantes, les vagues d’eau venues du ciel qui ont submergé la région de Valence (Espagne) dans la soirée et la nuit du mardi 29 au mercredi 30 octobre ont emporté plus de deux cents vies, selon un bilan provisoire, et semé la désolation sur une vaste zone urbanisée. Même si les violents orages d’automne constituent un phénomène ancien dans cette région méditerranéenne, le cauchemar, avec ses habitations envahies d’une boue épaisse et ses véhicules engloutis et enchevêtrés, n’a rien d’un accident. Le phénomène qui l’a causé est clairement identifié : la goutte froide, cette dépression isolée à haute altitude, est amplifiée à l’extrême du fait des millions de tonnes d’eau dont est chargé l’air en raison du réchauffement des températures océaniques.

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La catastrophe qui s’est abattue sur l’Espagne n’est que l’énième avertissement aux habitants de la planète sur l’impérieuse nécessité de stabiliser le réchauffement climatique en parvenant au zéro émission nette de gaz à effet de serre. Même dans une Europe qui s’est longtemps sentie épargnée, l’improbable est devenu banal. Des inondations dantesques et des tempêtes ont endeuillé récemment l’Allemagne, la Belgique et l’Europe centrale. Dans les seuls deux derniers mois, quatre départements français ont vécu de terribles inondations.

Mais le rythme de la dégradation est tel que la lutte contre le réchauffement ne peut plus que le ralentir. Celle-ci doit être complétée par des politiques d’adaptation à une réalité extrêmement problématique : l’étalement urbain dans les vallées fluviales, le lotissement de terres agricoles ont restreint le potentiel d’écoulement des eaux. La priorité est désormais de stopper cette artificialisation, de prendre en compte les risques climatiques dans toutes les politiques d’aménagement du territoire, mais aussi d’aider les personnes vivant dans les zones à risque, d’améliorer les systèmes d’alerte et d’assurance.

Or le choc de la catastrophe de Valence intervient à un moment d’affaiblissement de l’écologie politique et de recul des exigences liées au climat, en France comme dans bien d’autres pays. Selon l’étude menée pour la France par l’ONG Parlons climat et analysée par Le Monde, les tendances climatosceptiques découlent moins d’un défaut de connaissance que d’un rejet de discours perçus comme menaçant des modes de vie et des valeurs. L’accélération des politiques anti-réchauffement génère des réactions qui provoquent des reculs.

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Ironie de l’actualité, le troisième plan national d’adaptation au changement climatique, qui a été dévoilé par le premier ministre, Michel Barnier, quatre jours avant la catastrophe de Valence, a vu ses ambitions et ses moyens réduits. Des responsables politiques qui s’émeuvent des inondations en Espagne soutiennent l’assouplissement de l’objectif de zéro artificialisation nette des sols et la réduction des aides à la rénovation des bâtiments et à l’achat de véhicules électriques.

Face au risque d’une polarisation croissante de l’opinion, il appartient aux responsables politiques de trouver les mots afin de montrer que la véritable punition qui attend les Européens ne réside pas dans le discours écologique, mais dans les conséquences des reculades en la matière. Et qu’au cycle mortifère qui fait succéder l’oubli à la sidération face aux catastrophes il faut substituer des politiques conjointes et durables de lutte contre le réchauffement et d’adaptation destinées à assurer la protection de chacun.

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Le Monde

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