
Du chemin cyclable, seuls quatre pieds qui dépassent des transats trahissent leur présence. Sous l’ombre odorante du figuier, en cet après-midi de la fin août, Elisabeth et Léon Diehl s’offrent un repos que l’on devine mérité, face à leurs innombrables plants de tomates. Plus tard, à la fraîche, les deux octogénaires iront récolter les haricots verts, puis les premières pommes du verger. Léon extirpera alors de la poche de son jean le trousseau de clés numérotées de 1 à 4, ouvrant autant de portails.
Au centre-bourg de Muttersholtz (Bas-Rhin), tout près de Sélestat, le jardin du couple est traversé à deux reprises par une piste cyclable que délimite un solide grillage vert. « Si je pouvais, je leur décernerais la Légion d’honneur », assure, on ne peut plus sérieusement, le maire de cette commune de 2 300 habitants, Patrick Barbier. Il faut remonter dix-sept années en arrière pour comprendre cette drôle de situation qui met en joie tout un village – y compris les deux propriétaires du jardin tronçonné.
En 2008, M. Barbier est élu maire pour la première fois. L’édile, qui porte aujourd’hui la lunette ronde, le cheveu argenté et ses 67 ans avec une énergie de jeune homme, est un écologiste de toujours, dont l’enfance a été façonnée par des grands-parents agriculteurs, l’adolescence, par un professeur de sciences naturelles aux talents de conteur, et l’âge adulte, par son engagement dans l’influente association Alsace Nature. Quand il est nommé jeune instituteur à Muttersholtz, ses élèves passent nombre d’heures de classe sans y mettre un pied, creusant plutôt des mares ou plantant des miniforêts.
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