Implanter l’art au cœur de la ville sans transformer ses habitants en simples figurants : tel est le pari – réussi – de la toute première Biennale d’art qui se tient dans le centre historique de Boukhara (Ouzbékistan), mythique oasis de la Route de la soie. Lors du vernissage le 5 septembre, riverains et commerçants venus en curieux et en famille se sont mêlés aux VIP arty pour goûter à cette nouvelle attraction.

Dilia, dont la famille tient depuis seize ans un commerce de tapis, n’avait jamais été confrontée à la création contemporaine. Mais la jeune femme s’est laissé séduire par la procession de marionnettes géantes imaginée par l’artiste bangladais Kamruzzaman Shadhin, comme par les chants et danses folkloriques qui ont ponctué l’ouverture. « Les gens sont heureux d’être là, on n’a jamais vu ça », murmure-t-elle avec simplicité. De tels moments de joie collective, où tous les publics et tous les âges communient à l’unisson, sont rares dans le monde de l’art trop souvent enfermé dans sa bulle.

Tout aussi originale est la collaboration entre les 70 artistes invités et les artisans locaux qui ont façonné leurs œuvres. Un dialogue horizontal où chacun a appris de l’autre. La plasticienne russe Taus Makhacheva, qui a confié aux femmes du refuge Oydin Nur la réalisation de ses sculptures inspirées des parures de mariage ouzbèkes, a d’ailleurs tenu à accrocher au mur le contrat qui la relie à ces mains habiles. Cet accord type spécifie notamment qu’en cas de vente de l’œuvre, l’artiste et l’artisan seront rétribués à parts égales, du jamais-vu. « On veut changer les habitudes et montrer aux artistes du monde entier qu’il y a ici des artisans de talent, qui savent tout faire et qu’il ne faut pas laisser dans l’ombre », explique Diana Campbell Betancourt, commissaire de la biennale.

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