« On voulait voir de nos yeux ce qu’il reste de nos maisons. Ce n’est pas croyable », déplore Farid Al-Atrach, un forgeron qui explore les ruines de la demeure familiale dans le quartier de Qaboun, en cette mi-décembre 2024, quelques jours après la chute du dirigeant Bachar Al-Assad. Le flanc oriental de cet ancien bastion rebelle, juché sur les contreforts du mont Qassioun, au nord-est de Damas, n’est plus qu’un enchevêtrement de béton et de tôle broyée. Dans ce tas de poussière, il ne reste rien, pas même les fers à béton, revendus par des ferrailleurs à la solde du régime.

Comme d’autres familles qui errent sur ces amoncellements grisâtres, Farid et son fils Abou Farès foulent leurs terres pour la première fois depuis 2011. Jusqu’à la chute de Bachar Al-Assad, dimanche 8 décembre 2024, le régime interdisait aux habitants de revenir chez eux sans une autorisation spéciale, délivrée par les services de renseignement. Abou Farès est pourtant né ici, dans une chambre, à l’étage, dont il ne reste que les quatre murs, entre lesquels un figuier a miraculeusement poussé.

« Ma maison est une allégorie du pays : un tas de ruines. Bravo Bachar ! Ta chute est notre plus belle victoire », se réjouit le trentenaire qui tenait une boutique d’accessoires électroniques attenante. « On veut revenir s’installer ici. Mais il faudra des années et beaucoup d’argent pour reconstruire », dit-il. Des 30 000 habitants originels de Qaboun, il n’en reste plus qu’une poignée. « Nous sommes à peine 2 000 à être restés », estime Yasser Labbat, un épicier âgé de 65 ans, dont les enfants se sont exilés en Turquie, en Libye, au Liban et en Autriche. Le quartier a désormais des airs de ville fantôme. Dans les quelques ruelles préservées de l’anéantissement, les rideaux des magasins sont fermés, souvent lacérés d’éclats d’obus.

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