A 18 heures, c’est la pause. Les travailleurs quittent leurs machines à coudre, laissent derrière eux les piles de tissu rayé bleu et blanc ou uni mauve, et les tas de pochettes plastiques estampillées Shein qui seront reçues à l’autre bout du monde. Ils dévalent les escaliers par groupes de deux ou trois. Certains vont manger à la cantine aménagée au pied de cet immeuble de huit étages, dont chaque niveau est occupé par une petite dizaine d’ateliers travaillant pour les champions chinois de la fast-fashion.

D’autres préfèrent prendre l’air et changer de cuisine. Les serveurs des gargotes alentour connaissent les horaires, ils sont à l’affût. La nuit qui tombe, les enseignes éblouissantes, le flux continu de scooters électriques et les ouvriers qui sortent dîner donnent à ce quartier de Canton (Guangzhou), entièrement consacré à l’industrie textile, son atmosphère vibrante.

Dong, elle, a choisi de repasser à son dortoir qui est à cinq minutes à pied pour se poser un peu. A Hezhou d’où est originaire sa famille, à 300 kilomètres de là, dans la région du Guangxi, les opportunités de travail sont très limitées. Alors, à 18 ans, elle était partie pour Canton, accompagnée par sa sœur aînée qui y avait déjà trouvé du travail. Elle en a 21 aujourd’hui. En chemisier bleu ouvert sur un débardeur blanc, pointes des mèches décolorées, elle est souriante et ne se plaint pas, mais confie que les journées sont longues, le rythme usant : « Je suis fatiguée, mais si je ne me fatiguais pas je ne gagnerais pas ma vie, car je n’ai pas de compétences très spécifiques. »

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