A Moscou, le métro cherche à attirer de nouvelles recrues pour le front ukrainien

« Il faut bien aller défendre la patrie… » Pour Alexandre et Piotr, la suite de l’« opération militaire spéciale » du Kremlin en Ukraine se discute… en haut d’un Escalator, dans le métro. C’est dans l’un des endroits les plus inattendus de Moscou que ces deux jeunes hommes, qui souhaitent rester anonymes, s’échangent à la va-vite des informations sur la nouvelle vague de mobilisation lancée cet automne pour attirer, à grand renfort de publicité dans les rues de la capitale, des volontaires pour le front.

Les centres d’information pour le recrutement sont désormais de petits stands installés à l’entrée des principales stations de métro, comme à… Kievskaïa, la gare portant le nom de la capitale ukrainienne. C’est là, entre escaliers mécaniques et tourniquets, qu’Alexandre, assis derrière une table couverte de prospectus en papier glacé vert et bleu de l’armée, répond aux questions de Piotr, debout, passager en transit, solide gaillard aux yeux déterminés, mais peu bavard. L’échange entre les deux trentenaires à l’allure débonnaire dure à peine une minute. Le premier a rempli sa mission d’information. Le second repart avec, en main, la promesse de mirobolants revenus : il pourra gagner 5,2 millions de roubles en un an, soit plus de 50 000 euros.

« Ils s’engagent à la fois par patriotisme et pour l’argent ! », reconnaît avec un large sourire ironique Alexandre. Lui et des dizaines d’autres salariés du métro se relaient toute la journée par équipes de deux derrière ces tables de recrutement. « Le métro, c’est la ville. Et la ville, c’est l’Etat. Nous sommes tous mobilisés pour la victoire », assure-t-il entre deux propos sur le « régime fasciste de Kiev » embauchant des « mercenaires français » pour aider l’OTAN contre la Russie. En quelques mots, au milieu de la foule, s’enchaînent ainsi les éléments du narratif répété depuis deux ans et demi par le Kremlin et ses divers relais de propagande (télévision, école, théâtre et désormais… métro).

Le prospectus, tout comme les affiches collées un peu partout dans la ville, sur les bancs à la sortie des stations, mais aussi à l’entrée des magasins et au bas des immeubles, détaille les salaires et les primes promis, cofinancés par le ministère de la défense et la mairie de Moscou : 2,3 millions de roubles au moment de la signature, puis un salaire mensuel d’au moins 260 000 roubles. Selon l’agence Bloomberg, les dépenses militaires annuelles vont ainsi augmenter de 25 % en 2025 pour représenter 40 % des dépenses totales de l’Etat, soit 6,2 % du produit intérieur brut, un record depuis la période post-soviétique.

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